quinta-feira, 6 de setembro de 2012

LANDRÉ 12

1) L'ESPRIT D'EVEIL DU SOUHAIT
Il s'agit de l'esprit qui souhaite l'éveil parfait pour le bien d'autrui. Le maître Byams pa déclare:
"Développer l'esprit d'éveil, c'est désirer la parfaite bouddhéité pour le bien d'autrui."
Le développement de cet esprit d'éveil du souhait produit d'innombrables bienfaits.
"Si la seule pensée que "puissent les maladies du cerveau affectant les êtres vivants, disparaître", si cette seule pensée pour le bien d'autrui, produit un mérite immense, que dire alors (du bénéfice infini) apporté par le souhait de libérer chaque être vivant du malheur et de permettre à chacun de réaliser d'immenses qualités." (sPyod 'Jug)
Ainsi, la naissance d'un tel esprit du souhait de l'éveil est extrêmement rare et à la fois porteuse d'infinis bienfaits. Le même texte dit encore:
"Est-ce qu'un père ou une mère a jamais eu une telle pensée bénéfique? Est-ce que les dieux, les ermites ou même Brahma ont jamais eu une telle pensée? Si les êtres vivants n'ont même jamais eu pour eux-mêmes une telle pensée, ne serait-ce qu'en rêve, comment pourraient-ils bien l'avoir pour autrui?"
Si l'on s'interroge maintenant sur la cause permettant la naissance de l'esprit d'éveil, il s'agit de la grande compassion. Il est dit dans le Byang Chub Sems dPa'i sDe sNod (Bodhisattva pitaka):
"C'est la grande compassion qui précède le fort désir de l'éveil du Bodhisattva."
Si la cause de compassion n'existe pas, son fruit de l'esprit d'éveil ne peut apparaître; comme la compassion elle-même a pour racine l'amour, il convient de développer à la fois la compassion et l'amour authentiques. Lorsqu'apparaît le désir que les objets que l'on se représente, jouissent du bonheur et qu'ils soient libres de la souffrance, il faut réfléchir de la manière suivante: bien que ce soit mon devoir et mon plaisir d'établir les êtres dans le bonheur et de les libérer de la souffrance, pour le moment, malheureusement, je ne possède pas un tel pouvoir. Les grands de ce monde qui me sont bien supérieurs, tels que Brahma , Indra et les autres, ne l'ont pas non plus. Même les êtres suprêmes tels que les Auditeurs et les Bouddhas Solitaires, n'ont pas ce pouvoir. Seuls les Bouddhas Parfaitement Accomplis et omniscients possèdent ce pouvoir. Car, en effet, les Bouddhas sont libres de tout défaut dû à des fautes, et ils détiennent toutes les qualités; ils ont le pouvoir de jouir de l'état de la plus grande félicité et ils manifestent leur divine activité et la compassion protégeant tous les êtres sans exception des inconvénients de l'existence et de l'extinction. Ils ont aussi le pouvoir de réaliser aisément tous les objectifs immédiats et ultimes, si on les en supplie, et ils sont les seuls à posséder un tel pouvoir. C'est c'est état que je dois absolument obtenir. Si je l'obtiens, je m'efforcerai d'abord, comme l'habile capitaine créant par enchantement une cité merveilleuse sur une île au milieu de l'océan afin de permettre aux marchands épuisés par le voyage de prendre du repos, d'établir temporairement les êtres dans le Nirvana, en fonction de leurs trois sortes d'aspirations et au moyen de celui des trois véhicules leur convenant. Les soulageant ainsi de la souffrance de la roue de l'existence, ils se purifieront peu à peu et finalement, je m'efforcerai de placer tous les êtres vivants dans tous les univers, dans l'état de Bouddha. Il faut ainsi développer sincèrement un tel esprit.
Il est dit que mettre en pratique l'esprit d'éveil du souhait selon des instructions de visualisation, n'appartient qu'à cette lignée.
Comment réfléchir à cela? Hélas, bien que tous les êtres vivants qui ont été mon père et ma mère, aspirent au bonheur, en raison de leur ignorance des moyens d'obtenir ce bonheur, certains sont en proie maintenant à toutes sortes de souffrances, tandis que d'autres accumulent en grande quantité les actes de non-vertu, cause de futures souffrances. La taie de l'ignorance les aveugle, ils sont privés de la cane du soutien de la libération et la présence d'un maître de vertu, qui est comme l'oeil pour l'aveugle, leur fait défaut. Ils s'éloignent des états supérieurs et du chemin de la libération et frôlent les abîmes des trois mauvais états. Quelle pitié!"
Après avoir longuement réfléchi de cette manière, on poursuit: "Compatir à leurs souffrances ne suffit pas; il me faut les libérer de la souffrance et les établir dans le bonheur. Mais je ne possède pas encore un tel pouvoir. Seuls les Bouddhas Parfaitement Accomplis qui ont mené à leur terme les deux objectifs (le personnel et celui d'autrui), possèdent ce pouvoir. Un seul rayon de lumière émané du corps d'un Bouddha a le pouvoir d'établir un nombre immense d'êtres vivants dans l'Au-delà de la Souffrance et un seul de ses enseignements a aussi le même pouvoir. En bref, voir un Bouddha, l'entendre, y réfléchir et le toucher, soit directement soit indirectement, permet de combler aisément les désirs des êtres et seuls les Bouddhas détiennent un tel pouvoir. Comme je serais heureux si je pouvais obtenir cet état de Bouddha parfait et omniscient, pour le bien de tous ces êtres vivants qui ont été ma mère. Je dois absolument m'efforcer d'obtenir l'état de Bouddha parfaitement accompli.
Il faut ainsi méditer jusqu'au développement de ce désir, comme un assoiffé désire de l'eau. Puis, du fond du coeur, développer la pensée: "Après avoir obtenu la bouddhéité, je commencerai par placer temporairement tous les êtres vivants dans l'Au-delà de la Souffrance, au moyen des trois véhicules. Purifiant ainsi peu à peu chacune des trois sortes d'êtres, je les établirai ultimement dans l'état de Bouddha." Puis l'on prie avec ferveur pour que le Lama et les trois joyaux qui savent, nous aident dans cette oeuvre.

Dans les intervalles entre sessions, on se réjouira constamment à l'idée d'obtenir l'état de Bouddha parfaitement accompli, source d'innombrables et précieuses qualités, joyau exauçant les désirs. Il est également important de réciter chaque jour, six fois par vingt-quatre heures ou matin et soir, la prière aux sept membres suivie du refuge et du développement de l'esprit d'éveil du souhait et en application, tels qu'on les trouve dans le texte du sPyod 'Jug. Ceci doit être fait chaque jour sans faute.
2) L'ESPRIT D'EVEIL EN APPLICATION, A SAVOIR L'ENTRAINEMENT DANS LA VOIE EN VUE DU FRUIT

Il s'agit de l'engagement dans l'action pour le bien d'autrui, en vue du parfait éveil. Le sPyod 'Jug dit que la différence entre le souhait et l'action (de l'esprit d'éveil) réside dans le fait qu'il s'agit d'étapes successives:
"Comme l'on connaît la différence entre désirer partir et partir réellement, de même le sage comprendra-t-il la différence entre ces deux étapes."
Mû par une immense compassion ne pouvant supporter les souffrances d'autrui, et alors que naît le désir d'obtenir le parfait éveil pour leur bien, il ne faudra pas se décourager mais au contraire mettre tous ses efforts à son obtention effective. Le maître Byams pa dit:
"O Nobles Etres, porter sur sa tête le fardeau des êtres vivants et marcher sans hâte, n'est pas beau; alors que moi-même et autrui sommes liés par toutes sortes d'entraves, il est raisonnable de développer des efforts encore cent fois plus grands."
Si l'on s'interroge maintenant sur la méthode pour réaliser l'incomparable éveil, elle consiste dans le fait d'abandonner ses propres objectifs égoistes et de se préoccuper d'accomplir le bien d'autrui.
"Tout le bonheur pouvant exister dans le monde, provient du désir du bonheur d'autrui; tout le malheur dans le monde provient du désir de son propre bonheur égoiste. Il n'est nul besoin d'en dire plus: regardez la différence entre l'être infantile ne se préoccupant que de lui-même et le puissant (Bouddha) accomplissant le bien d'autrui." (sPyod 'Jug)
Ainsi, la raison pour laquelle nous ne nous sommes pas libérés plus tôt de la roue de l'existence et avons dû en conséquence endurer toutes sortes de souffrances, est que nous avons abandonné les êtres qui ont été notre mère et que, d'un esprit ne chérissant que notre propre personne, nous ne nous sommes préoccupés que de nous-mêmes. Croyant depuis un temps immémorial à un "moi" et à un "soi" là où il n'y avait ni "moi" ni "soi", on s'est uniquement chéri et préoccupé de soi-même, et dans ce but, on en est venu à commettre toutes sortes de non-vertus nuisant à autrui. Ainsi, on a dû ensuite endurer toutes sortes de souffrances au sein de la roue de l'existence.
"O mon esprit, ne désirant que ton propre bien, d'innombrables éons se sont ainsi passés; malgré toutes ces épreuves, tu n'as trouvé que la souffrance." (sPyod 'Jug)
Considérant donc ce souci exclusif de soi-même comme l'ennemi à abattre, il convient de s'entraîner à tourner l'action de ses trois portes vers la réalisation du bien d'autrui.
Trois points vont être évoqués, regardant la manière de mettre ceci en pratique: la méditation de l'identité entre soi et autrui, la méditation de l'échange et l'entraînement à ce comportement.
a) La méditation de l'identité entre soi et autrui:
Ceux qui, au départ, se sentent incapables de méditer l'échange, s'entraîneront tout d'abord seulement à la méditation de l'identité entre soi et autrui. Il s'agit là du moyen habile capable d'amener progressivement l'esprit à la méditation de l'échange. Le même texte poursuit:
"Entraînez vous d'abord avec diligence à méditer sur l'identité entre vous-même et autrui. Puisque bonheur et souffrance sont les mêmes pour tous, vous pourrez ainsi vous soucier d'autrui comme vous le faites de vous-même."
En ce qui concerne la signification des termes "identité entre soi et autrui", ils impliquent que de même que je désire le bonheur, les autres êtres également le désirent; je dois donc être l'ami les aidant à obtenir le bonheur. De même que je déteste la souffrance, les autres êtres également la détestent; je dois donc être l'ami leur permettant de se libérer de la souffrance. Le texte du sPyod 'Jug dit:
"Puisque moi-même et tous les autres êtres désirons également le bonheur, qu'ai-je donc de si spécial? Pourquoi ne devrais-je me préoccuper que de mon seul bonheur? Puisque nous sommes pareils à refuser la souffrance, qu'ai-je donc de si spécial? Pourquoi me protéger seul et non pas les autres?"
Si l'on pense qu'il convient que ce soit les autres êtres qui se protègent contre les souffrances qui les affectent et que je dois, moi, me préoccuper de me protéger contre celles qui m'affectent moi-même, ce raisonnement est comparable à celui qui estimerait que la main n'a pas à extirper l'épine blessant le pied, car en effet, il convient qu'aucun autre que celui endurant la douleur (le pied) ne vienne soulager cette souffrance. Le même texte poursuit:
"(S'il faut) que l'on se protège soi-même, alors la main n'a rien à faire de la douleur du pied."
Pourtant, si l'on insiste en prétendant que les deux situations ne sont pas identiques car le pied m'appartient tandis que les êtres sont étrangers, le raisonnement n'est pas juste. En effet, ce pied que j'appelle mien provient en fait du sang et de la semence de mon père et de ma mère, et c'est sous l'effet de l'habitude que j'en suis venu à le considérer comme mien. Si je considère les êtres vivants comme mes êtres vivants, sous l'effet de l'habitude aussi, j'en viendrai vraiment à les considérer comme tels. Le sPyod 'Jug poursuit:
"Tout comme tu en viens à considérer comme tien ce qui est en fait issu du sang et de la semence d'autrui, habitue toi à considérer les autres de la même manière."
"Tout comme sous l'effet de l'habitude à l'égard de ce corps dépourvu d'un moi, j'en suis venu à le considérer comme mon moi, si je m'habitue à considérer les autres êtres de la même manière, pourquoi le sentiment du moi ne naîtrait-il pas à leur égard?" (sPyod 'Jug)
En bref, moi-même et les autres êtres sommes semblables en ce que tous, nous désirons le bonheur et refusons la souffrance; en conséquence, il convient de rejeter tous les actes à l'encontre d'autrui, tels que les comportements faisant obstacle à l'accomplissement de leurs désirs et ceux visant à leur faire du mal. Il faut au contraire, avec un pur esprit de générosité, s'efforcer de soulager leurs souffrances et réaliser leur bonheur.
"Je dissiperai la souffrance d'autrui car, étant souffrance, elle m'affecte également. Je m'efforcerai de faire le bien d'autrui car, comme ils sont des êtres vivants, ils me sont (aussi chers) que mon propre corps." (sPyod 'Jug)
Si je pense que, malgré ma promesse de libérer autrui de la souffrance et de l'établir dans le bonheur, je n'ai pas le pouvoir d'obtenir un tel résultat, le débutant, bien qu'en effet il n'ait pas un tel pouvoir, devra pourtant s'efforcer du fond du coeur, de ne jamais se séparer d'une telle pensée. S'efforçant d'abord d'accomplir le bien d'autrui comme le lui permettent ses capacités, peu à peu, il deviendra capable de réaliser ce même objectif de façon très étendue. Le maître kLu sGrub a dit:
"Même si vos actions pour le bien d'autrui manquent de force, conservez-en pourtant toujours le désir. Celui qui en a la pensée réussira à agir dans ce sens."
Comment réfléchir à cela? Après avoir développé la prière du refuge, on poursuit par la pensée suivante: "Je dois obtenir le précieux état de Bouddha parfaitement accompli pour le bien de tous les êtres vivants de l'espace infini, qui ont un jour été ma mère. Dans ce but, je m'efforcerai à la pratique de la voie profonde."
On peut aussi préférer réciter trois fois les paroles suivantes, tout en réfléchissant à leur sens: "Afin de libérer de l'existence les êtres qui ont été ma mère, je dois obtenir l'état de Bouddha parfaitement accompli. Dans ce but, je mettrai en pratique le profond yoga de la voie des Bouddhas.

Hélas, bien que j'aspire et me réjouisse à l'obtention du grand et incomparable éveil pour le bien de tous les êtres vivants, je ne pourrai pourtant devenir un Bouddha avant d'avoir réussi à maîtriser l'attachement au moi et avant que tous les actes de mes trois portes ne soient dirigés vers la réalisation du bien d'autrui. Ainsi, je vais d'abord rejeter ce souci exclusif de moi-même qui est la source de mon malheur et de mes échecs et je m'en vais demeurer fermement dans la seule voie foulée par les fils des Bouddhas, qui est la méthode de la motivation de toutes les actions par le bien d'autrui. En outre, de même que j'aspire au bonheur, tous ceux que l'on nomme êtres vivants, y aspirent également. A partir de maintenant donc, je vais aider tous les êtres vivants à obtenir le bonheur et ses causes. Puisque comme moi-même, tout ce que l'on nomme être vivant, déteste la souffrance, à partir de maintenant, je vais aider tous les êtres vivants à se libérer de la souffrance et de ses causes.
Réfléchissant longuement de cette manière, on produit une pensée se réjouissant réellement à cette perspective.

b) Méditation de l'échange:
Celui qui désire rapidement obtenir la bouddhéité, devra s'appliquer à la méditation de l'esprit d'éveil de l'échange entre soi et autrui.
"Celui qui désire rapidement protéger autrui et soi-même s'engagera dans ce saint secret de l'échange entre soi et autrui." (sPyod 'Jug)
Mais la seule pensée de l'identité entre soi et autrui ne suffit pas à réaliser l'éveil. Le même texte poursuit:
"Si l'on n'échange pas parfaitement son bonheur avec la souffrance d'autrui, on ne peut devenir Bouddha et on ne peut jouir du bonheur dans la roue de l'existence."
Comment expliquer cela? Comme tous les êtres vivants ont été depuis un temps sans commencement ma mère dévouée, ils m'ont par le passé comblé de leurs bienfaits et maintenant encore, la réalisation de l'incomparable éveil dépendant des êtres vivants, ils me sont toujours d'un grand bienfait. Il convient donc que j'aspire et me réjouisse de prendre sur moi la souffrance de tous les êtres vivants avec sa cause, et de leur donner mon propre bonheur et mes vertus. Si, dans un désir contraire, on inflige des souffrances à autrui afin d'assurer son propre bonheur, comment pourrait-on espérer atteindre l'état de Bouddha? On ne pourrait alors se libérer de la roue de l'existence et l'on devrait y endurer toutes sortes de souffrances.
"En désirant sa propre supériorité, on s'attire les mauvais états, la solitude et la bêtise; en reportant ce même désir sur autrui, on obtiendra le bonheur des états supérieurs. Si je me sers d'autrui pour mes propres fins, je me retrouverai un jour dans une position inférieure de serviteur ou autre; si je me mets au service des autres, je deviendrai un jour seigneur ou autre." (sPyod 'Jug)
Si l'on ne maîtrise pas immédiatement cet immense souci exclusif de soi-même, grâce à une forte vigilance, comment pourrait-on envisager d'obtenir libération et omniscience? On ne pourrait même pas réussir à réaliser les objectifs de cette vie. Quelles que soient les personnes à qui l'on ait à faire, que ce soit des instructeurs, des amis ou des proches, le temps se passe à des disputes sur le rang, le siège, la nourriture et finalement, sur des questions de supériorité ou d'infériorité. Toute la durée de cette vie humaine, aucun de mes désirs ne se réalisera et au contraire, toutes sortes de malheurs m'arriveront, sans que personne ne vienne me consoler. En bref, toute infortune ayant pour source ce souci exclusif de soi-même, il faut le considérer comme un ennemi et lui attribuer toutes les fautes d'autrui, parvenant ainsi à détruire cet ennemi redoutable. Comme tous les bienfaits et bonheurs surviennent en s'appuyant sur les êtres vivants, il faut donc les regarder comme ses proches. Si l'on acquiert le désir de donner tout son bonheur et ses vertus aux êtres vivants qui ont été mon père et ma mère, alors toutes les vertus que l'on accomplira, comme celle de garder la discipline éthique ou la triple activité de l'étude, de la réflexion et de la méditation, etc... deviendront cause de l'éveil. S'il en était autrement, et quelles que soient les qualités d'érudition, de discipline et de noblesse que l'on s'enorgueillisse de posséder, et même si l'on s'efforçait réellement à la vertu, un tel Dharma ne pouvant servir d'antidote au souci exclusif de soi-même, ne permettrait pas de se détacher de la roue de l'existence. C'est pourquoi il est très important que les pratiquants du Dharma connaissent ce point.
Si l'on pense maintenant que prenant sur soi la souffrance d'autrui, on ne va pas pouvoir en supporter le fardeau et par conséquent, on sera incapable de pratiquer cette méditation de l'échange entre soi et autrui, on est dans l'erreur. En effet, c'est le pouvoir de cet esprit du bien qui médite de cette façon, qui va permettre d'apaiser la souffrance d'autrui, mais cette même souffrance ne va pas grandir en moi. Non seulement, elle ne va pas grandir mais sous l'effet de l'habitude d'une telle méditation, on va pouvoir se débarrasser de ce souci exclusif de soi-même. On deviendra ainsi capable, si le bien d'autrui est en jeu, de donner sans même y penser, sa tête, ses jambes ou ses bras, c'est à dire d'accomplir peu à peu les actions d'un Bodhisattva, vastes comme l'océan. Ce faisant, on obtiendra l'état de Bouddha parfaitement accompli.
"Ainsi il convient de s'engager totalement dans l'action en vue du bien d'autrui. Comme les paroles du puissant sont véridiques, on constatera plus tard les qualités obtenues. (sPyod 'Jug)
Comme le Bouddha parfaitement accompli ne ment jamais, c'est l'accomplissement du bien d'autrui qui permet d'accomplir son propre bien. Ainsi, il faut penser que j'ai bien trop tardé à méditer cet esprit d'éveil de l'échange entre moi et autrui, et que si je l'avais médité plus tôt, je serais maintenant devenu Bouddha et ne jouirais plus que du bonheur sans devoir endurer les souffrances qui m'affligent encore. Appliquez-vous donc à cette méditation. Le sPyod 'Jug dit encore:
"Si tu avais agi ainsi beaucoup plus tôt, le parfait accomplissement de la bouddhéité serait tien et les conditions présentes d'infortune n'existeraient pas."
A ce moment de la transmission de l'enseignement, il sera bon de rapporter quelques histoires des vies antérieures du Bouddha comme lorsqu'il était conducteur de charrette dans les enfers ou les récits de la fille de mZa' bo, etc...
En ce qui concerne la mise en pratique, le même texte explique:

"Afin de soulager ma propre peine ainsi que les douleurs d'autrui, je dois me donner aux autres et considérer autrui comme s'il s'agissait de moi-même."
Me représentant tout d'abord ma propre mère, je réfléchis de la manière suivante: Ma mère m'a protégé du malheur et m'a comblé de nombreux bienfaits; il me faut donc moi aussi la protéger de ce malheur et lui rendre ses bienfaits. Qu'est-ce qui fait du mal à ma mère? C'est la souffrance qu'elle endure actuellement et les causes de celle-ci qui continueront à lui nuire au cours de ses existences. Je vais donc les prendre sur moi toutes les deux.
On imagine alors que la souffrance de ma mère et sa cause se reportent toutes deux sans exception sur moi et on développe la joie à cette perspective. Ce faisant, je pense avoir extirpé à sa racine le souci exclusif de moi-même.

On poursuit: Ce qui ferait le bien de ma mère serait de jouir actuellement du bonheur et des vertus qui sont la cause de la persistance du bonheur. Je vais donc les lui donner;
Je m'imagine donnant à ma mère tout mon bonheur et toutes mes vertus, sans me soucier de mes désirs propres, son corps et son esprit jouissent alors aussitôt du bonheur, et désormais, elle possède la vertu cause de son bonheur futur. On développe un esprit de joie à cette perspective.

Il faut ensuite méditer de la même façon à l'égard des autres êtres vivants.
Comment y réfléchir? Me représentant tout d'abord ma mère actuelle, je pense: Hélas, ma mère qui m'est toute dévouée et qui m'aime tant, m'a donné ce corps particulièrement approprié à la réalisation de l'éveil; elle m'a protégé de toutes sortes de malheurs et de craintes tout en me comblant de bienfaits innombrables. Ce n'est pas seulement dans cette vie qu'elle a agi ainsi, mais dans toutes les nombreuses autres où, m'ayant servi de mère, elle m'a pareillement comblé de ses bontés. Quelle pitié que de la voir maintenant errer au sein de la roue de l'existence, malgré son dévouement inlassable à mon égard. Je vais donc m'efforcer d'obtenir l'état de Bouddha parfaitement accompli et omniscient pour le bien de ma mère. Si je ne suis pas plus tôt devenu Bouddha, c'est que j'ai abandonné le souci de ma mère dévouée et que je me suis exclusivement préoccupé de moi-même. Désormais dans cette courte vie, je vais maîtriser ce féroce souci exclusif de moi-même, et rejeter toute action pour son service et sa puissance. C'est par le Dharma que je m'en vais répondre aux bontés de ma mère. Comme c'est la souffrance et sa cause, qui lui nuisent, je vais les prendre toutes deux sur moi.
Tout en prononçant les paroles: "puissent toute la souffrance de ma mère dévouée ainsi que ses causes de non-vertu, porter fruit en moi!" on imagine que cette souffrance ainsi que sa cause se détachent d'elle sous forme de lambeaux noirs, comme l'action du rasoir détachant le cuir (d'une dépouille animale), et qu'elle s'absorbe au centre de mon coeur. Il faut longuement méditer avec joie dans cette perspective. J'imagine que cette pratique fait disparaître entièrement du sein de mon continuum mental, l'illusion de ce féroce souci exclusif de soi-même, pareille à l'illusion prenant une corde rayée pour un serpent. Il disparaît ainsi arraché à sa racine.
Ce qui ferait le bien de ma mère serait la possession du bonheur et de ses causes. En conséquence, je vais lui donner tout mon bonheur et mes vertus. Dans cette pensée, on prononce les paroles: "Puissent tout le bonheur de mon continuum mental et sa cause de vertu, porter fruit en ma mère!
J'imagine alors que tous mes bonheurs et vertus sortent de mon coeur comme un lever de soleil et sont transférés sur ma mère. Alors qu'elle en jouit, elle se sent immédiatement heureuse et, comme elle réunit toutes les conditions favorables à la pratique du Dharma , je médite qu'elle accroit ainsi sa vertu et devient capable d'obtenir l'état de Bouddha. Je réfléchis longuement à ce que serait ma joie si ceci se produisait. Ayant ainsi longuement médité du fond du coeur sur ces deux pratiques du don (de son bonheur) et de la prise sur soi (du malheur d'autrui), lorsque la visualisation acquiert une certaine clarté, il faudra répéter les paroles suivantes tout en gardant constamment une visualisation très claire: "Puisse la souffrance des êtres qui ont été ma mère porter fruit en moi; puisse ma vertu procurer le bonheur à tous ces êtres!" La première moitié de ces paroles se réfère à la prise sur soi (de la souffrance) tandis que la deuxième partie se réfère au don (de son bonheur).
Puis, du fond du coeur, j'émets la pensée suivante: "Après que ma mère jouisse ainsi du bonheur et de sa cause et qu'elle soit libérée de la souffrance et de sa cause, puisse-t-elle rapidement obtenir l'état de Bouddha."

On étend ensuite cette méditation d'abord à son propre père et aux autres proches, puis aux autres êtres dans les six états d'existence en méditant séparément pour chacun des six groupes et on se sent ému de compassion à la pensée que, contrairement à leurs désirs, ils doivent endurer toutes ces souffrances. Comme tout à l'heure, je penserai donc que pour leur bien, il me faut obtenir l'état de Bouddha parfaitement accompli et omniscient. J'accomplirai à leur égard la visualisation du don et de la prise sur soi. Finalement, on réfléchira longuement avec compassion, que bien qu'en vérité ultime, les êtres vivants, bénéficiaires de la pratique de l'échange entre soi et autrui, l'acteur de la pratique, c'est à dire soi-même, et l'objet de l'échange, c'est à dire le bonheur et la souffrance, avec ce souci exclusif de soi-même, bien que ces trois là soient dépourvus de toute réalité ultime, sous l'effet d'un esprit plongé dans l'illusion de la vérité relative, on a pourtant le malheur d'en expérimenter la vision dénuée d'essence. On pensera alors qu'il faut rapidement obtenir l'état de Bouddha parfaitement accompli et omniscient, pour le bien de tous ces êtres. Puis l'on dédiera le bienfait de cette vertu.
Dans toutes les activités, également, il me faudra penser à garder l'esprit d'éveil dans lequel autrui m'est plus cher que moi-même et le renforcer en l'exprimant de la manière suivante: "Puissent toutes les souffrances des êtres mûrir sur moi; puisse ma vertu leur procurer à tous le bonheur!" Je m'efforcerai à ce que tous les actes de mes trois portes soient bénéfiques aux autres. Lorsque naîtra un esprit uniquement préoccupé de mon bien propre, je devrai penser au sens des paroles du sPyod 'Jug, afin d'éviter de tomber sous le pouvoir de l'égoïsme:
"Voilà celui qui t'a fait du mal des centaines et des milliers de fois au sein de la roue de l'existence; te remémorant maintenant qu'il est ton ennemi, emploie toi à vaincre la pensée de ton bien égoïste."
A certaines occasions, lorsque le corps tombera malade ou que l'esprit sera affligé de souffrances insupportables, on pourra réfléchir de la manière suivante, afin de transformer ces souffrances pour qu'elles deviennent bénéfiques à la pratique: "Il y a de par le monde beaucoup d'êtres qui sont comme moi, malades ou qui souffrent terriblement. Quelle pitié que de les voir ainsi souffrir contrairement à tous leurs désirs. Puissent toutes ces souffrances porter leurs fruits dans ma souffrance actuelle." On méditera donc de la même manière que précédemment indiqué.
De la même façon, je penserai avec compassion aux êtres des enfers qui, contrairement à tous leurs désirs, doivent endurer ces terribles souffrances d'un froid et d'une chaleur extrêmes. Comme tout à l'heure, je souhaiterai: "Puissent toutes leurs souffrances de froid et de chaleur porter leurs fruits dans ma souffrance actuelle!"
De manière analogue, on pratiquera avec force la visualisation de la prise sur soi et du don, à l'égard de chacun des six états d'existence. On pensera ainsi: "Si mon corps n'avait pas eu cette maladie ou si mon esprit n'avait pas ressenti cette souffrance, j'aurais continué à me laisser distraire par les actes et les préoccupations de cette seule vie. Fou d'orgueil et d'arrogance, je n'aurais ressenti aucune lassitude de l'existence dans la roue et je ne me serais pas occupé du bien et du mal à suivre ou à rejeter. C'est cette maladie et cette souffrance qui me poussent maintenant à me tourner vers les lieux de refuge et vers le Dharma, qui m'incitent au dégoût (du monde) et à sa lassitude, et qui me permettent de faire mûrir ici de nombreux actes qui auraient autrement porté leurs fruits dans la souffrance des enfers lors d'existences futures. Si l'on procède de cette manière, même la maladie ou la souffrance peuvent devenir une voie pour l'éveil.
"Autrement, les vertus de la souffrance sont la naissance d'un esprit que le monde chagrine et par là-même, l'anéantissement de l'orgueil. Elle fait naître la compassion à l'égard des êtres au sein de la roue de l'existence, fait éviter le mal et aimer la vertu." (sPyod 'Jug)
Si l'on est en proie à l'attaque d'esprits nuisibles (gDon), on méditera de la façon suivante: "Cet esprit m'a servi de mère durant nombre de mes existences au cours desquelles il m'a comblé de ses bienfaits et protégé du malheur. Encore maintenant, alors que mon corps, ma parole et mon esprit oublient la vertu sous l'emprise de la distraction, c'est lui qui incite mes trois portes à se tourner vers la vertu, continuant ainsi à me manifester ses bontés. Pourtant, sous l'emprise de l'ignorance, je le considère comme un ennemi et ceci n'est pas bien. Désormais, je m'en vais répondre à ses bienfaits par le saint Dharma. Ce qui lui serait bénéfique serait la jouissance du bonheur et de sa cause, ainsi que la délivrance de la souffrance et de sa cause. Puisse donc sa souffrance avec sa cause porter fruit en moi!" Ce faisant, même l'attaque d'un esprit nuisible peut contribuer à l'éveil.
"En se voyant soi-même comme plein de fautes et autrui comme un océan de qualités, on méditera sur le total abandon (du souci exclusif) de soi-même et sur la prise (du souci) d'autrui." (sPyod 'Jug)
Si survient le souvenir insupportable du mal causé par autrui tel qu'un ennemi ou autre, comme on l'a dit tout à l'heure lors de la méditation de l'amour et de la compassion, il faudra penser que celui qui me fait du mal maintenant, a été ma mère dans nombre de mes existences et m'a ainsi comblé de ses bontés. Encore maintenant, il m'est une aide pour vaincre la vanité et l'orgueil. Il m'est donc bénéfique. Dans le désir de répondre à ses bienfaits, il faudra méditer cette double pratique de la prise sur soi et du don. On peut aussi réfléchir que cet ennemi comme cet esprit nuisible, ayant été ma mère durant de nombreuses existences, m'ont comblé de leurs bienfaits et protégé du malheur. Quelle pitié que de les voir maintenant me faire du mal, sous l'emprise de l'illusion. C'est dans ces dispositions d'esprit que l'on doit pratiquer la prise sur soi et le don. Ce faisant, les mauvaises conditions elles-même deviennent une voie vers l'éveil. Le même texte dit encore:
"Ainsi, (cet ennemi) est comme un trésor apparaissant sans effort dans ma maison; comme il m'aide dans la pratique de la voie du Bodhisattva, je dois l'aimer."

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